La décision du Conseil d’arbitrage du Yukon (le Conseil) dans l’affaire Malcom et Baker, Commission des droits de la personne du Yukon c. Collège du Yukon a été portée en appel devant la Cour suprême du Yukon (la Cour). Les faits se rapportant à l’appel sont les suivants. Madame E. était arbitre en chef du Conseil au moment de l’affaire. Elle a entendu les conclusions des parties en septembre 2010 et son mandat d’arbitre en chef a pris fin en décembre 2010. Elle a rendu sa décision en mai 2011. La question centrale de cet appel était de savoir si madame E. avait compétence pour rendre une décision une fois son mandat terminé.

Les intimés ont soulevé les questions suivantes devant la Cour.

  1. Avaient-ils renoncé à quelque moment que ce soit à leur droit de contester la compétence de madame E. à l’égard de cette décision?
  2. La décision avait-elle été « prise » avant l’échéance du mandat de madame E.?
  3. Si non, la Cour devrait-elle établir un « délai de grâce » pour qu’un arbitre puisse boucler un dossier après l’expiration de son mandat?
  4. Si non, madame E. avait-elle encore compétence pour instruire la plainte au terme de son mandat?

Premièrement, la Cour a déterminé que la validité de la décision de madame E. dépendait entièrement de sa compétence à rendre cette décision. Que l’une ou l’autre des parties la conteste ne changeait rien à cela.

Deuxièmement, la Cour a cherché à savoir si la décision avait été « prise » avant l’expiration du mandat de madame E. Le Conseil a statué qu’une décision n’est « prise » qu’au moment où elle est couchée par écrit ou officiellement prononcée. Aucune décision finale ne peut être modifiée. Pour cette raison, le Conseil a conclu que la décision avait été prise en mai 2011, après l’expiration du mandat de madame E.

Troisièmement, la Cour n’a pu se prononcer sur la question du « délai de grâce ». La Cour suprême du Canada a pour sa part statué que dans de telles circonstances, il fallait assurément autoriser les membres du conseil à mener l’affaire à bien, même si leur mandat était expiré. Il arrive que certaines audiences traînent en longueur et il est difficile d’intégrer un nouvel arbitre au milieu des procédures. Cependant, aucune disposition de la Loi sur les droits de la personne du Yukon (la Loi) ne permet aux membres d’un conseil d’arbitrage de poursuivre un dossier jusqu’à sa conclusion audelà de leur mandat. La Cour a conclu que la Loi était valide et pratique en l’état et qu’il ne lui appartenait pas d’y enchâsser la question des mandats.

Quatrièmement, la Cour a jugé que l’expiration du mandat de madame E. n’enlevait rien à sa compétence de rendre une décision. L’article 22 de la Loi établit deux organes distincts : le Comité d’arbitrage (le Comité) et le Conseil. Le Comité est constitué d’arbitres nommés pour une période de trois ans, alors que le Conseil est un organe distinct mis sur pied le temps d’instruire une plainte. De façon générale, le paragraphe 22(4) de la Loi prévoit que l’arbitre en chef forme le Conseil et « en détermine la composition ». Une lecture générale du texte donne donc à penser que l’arbitre en chef n’est pas obligée de choisir les membres du Conseil parmi ceux du Comité. Or, même si le paragraphe 22(1) de la Loi indique que les arbitres sont « appelés à » instruire les plaintes, la Cour a conclu qu’elle ne pouvait déroger de l’interprétation générale du paragraphe 22(4). Par conséquent, rien dans la Loi n’exige que les membres du Conseil soient nommés parmi les membres du Comité. Aussi l’expiration du mandat de madame E. n’enlevait-elle rien à sa compétence de rendre une décision.

Ayant tiré ces conclusions, la Cour a confirmé la décision du Conseil. Elle a ordonné aux plaignantes et aux intimés de demander une audience sur les frais juridiques concernant leurs frais respectifs.