Le harcèlement sexuel au travail est un problème très important. S’il est ignoré ou s’il n’est pas pris suffisamment au sérieux, il peut avoir des répercussions aussi bien sur la productivité des employés que sur les bénéfices des entreprises, en passant par la satisfaction au travail et l’estime de soi des employés. Ses effets ont des répercussions sur des équipes entières et ceux qui les entourent. Enfin, c’est une forme illégale de discrimination. Pour cette raison comme pour bien d’autres, la lutte au harcèlement sexuel au travail est l’affaire de tous. Pour pouvoir prendre des mesures efficaces de lutte, il est impératif de savoir en quoi il consiste. Ce document a pour but de favoriser la prise de mesures concrètes en expliquant ce que signifie l’expression « harcèlement sexuel au travail ».
Quelle que soit la forme que prend le harcèlement, il est toujours répréhensible. Les protections juridiques ont toutefois leurs limites et la Loi sur les droits de la personne du Yukon (la Loi) offre une protection seulement contre du harcèlement qui s’attaque à certaines caractéristiques, appelées motifs illicites de distinction, et dans certaines situations, appelées secteurs protégés. Le harcèlement au travail est interdit par la Loi parce que tous les aspects de l’emploi (embauche, congédiement, traitement en cours d’emploi, etc.) sont des secteurs protégés, et que le sexe (incluant la grossesse), ainsi que l’expression et l’identité de genre sont des motifs illicites de distinction.
Définition
La Loi sur les droits de la personne du Yukon (la Loi) définit le harcèlement comme suit :
« faire des remarques ou des gestes vexatoires, exiger ou solliciter des faveurs sexuelles ou faire des avances, dont on sait ou devrait raisonnablement savoir qu’ils sont importuns. »
Geste ou ensemble de gestes graves
Analysons cette définition pas à pas. Le premier concept important est celui « des remarques ou des gestes vexatoires ». Dans ce cas, vexatoire signifie pénible ou inquiétant. Le pluriel indique que le comportement s’est produit plus d’une fois ou qu’il est répétitif. Des « remarques ou des gestes vexatoires » signifie simplement une série d’actes pénibles.
Un acte isolé peut être considéré comme du harcèlement sexuel s’il est suffisamment grave. Plus l’acte est grave, moins il doit être fréquent pour être considéré comme du harcèlement. Par exemple, une seule agression sexuelle sera presque certainement considérée comme du harcèlement sexuel, mais une seule insulte fondée sur le sexe ne le sera sans doute pas.
Exiger, solliciter, faire des avances
Le deuxième concept important est celui d’« exiger ou solliciter des faveurs sexuelles ou faire des avances ». Cela signifie généralement demander quelque chose qui a un lien avec le sexe, l’identité de genre ou l’expression de genre de la personne harcelée. Cela peut aller de demander un rendez-vous galant jusqu’à exiger des actes sexuels.
Sexe et identité ou expression de genre sont des motifs illicites de distinction selon la Loi.
Si l’on combine les deux premières parties de la définition, on comprend qu’une série d’actes pénibles ou d’exigences liées au sexe ou à l’identité ou l’expression de genre est très probablement du harcèlement sexuel. Par exemple, afficher des images à connotation sexuelle dans les toilettes communes du lieu de travail, ou exiger un rendez-vous galant quand on est un superviseur responsable de l’évaluation du rendement des employés peut être du harcèlement sexuel, tout comme appeler quelqu’un d’un nom désobligeant associé à son sexe ou son genre, ou refuser de parler à un collègue en utilisant le pronom de son choix.
Importuns et blessants
La dernière partie de la définition se lit « des gestes […] dont on sait ou devrait raisonnablement savoir qu’ils sont importuns ». On pourrait la reformuler ainsi : « une personne raisonnable serait-elle gênée, mal à l’aise ou effrayée par cette conduite? » Le comportement doit être celui d’une personne ordinaire, peu importe l’intention. Dans les cas de harcèlement sexuel au travail, c’est l’impact sur la personne harcelée qui importe.
Donc, le harcèlement sexuel signifie généralement des actes graves ou répétés ou des exigences liées au sexe, à l’identité de genre ou à l’expression de genre qui engendrent la gêne, le malaise ou la peur. Sachant cela, il est facile de comprendre pourquoi le harcèlement sexuel est presque toujours un jeu de pouvoir, et ne doit pas nécessairement comporter un élément d’attirance sexuelle. Par exemple, quelqu’un qui fait toujours des plaisanteries sexistes qui minent la confiance d’un collègue ne le fait peut-être pas en raison d’une attirance sexuelle envers ce collègue. Ce n’en est pas moins du harcèlement sexuel. Que ce soit intentionnel ou non, ce genre de plaisanteries vient souvent renforcer une mentalité qui règne dans les milieux de travail traditionnellement associés à un sexe, et peut miner l’autorité et l’estime de soi de ceux et celles qui en sont la cible.
La menace de représailles est souvent un autre aspect de la dynamique de pouvoir. Les représailles et la peur des représailles sont des éléments majeurs du harcèlement sexuel au travail. Les employés harcelés peuvent ne pas parler de la gêne que leur causent les actions de leur supérieur parce qu’ils craignent de perdre leur emploi ou de manquer des occasions d’avancement. Parfois, ils craignent aussi les représailles de leurs collègues qui pourraient les considérer comme des « mouchards » ou des « rabat-joie ». Les deux raisons principales pour lesquelles les victimes ne signalent pas le harcèlement sexuel au travail sont la crainte de représailles et le manque de confiance dans le processus de traitement des plaintes.
Le contexte est important!
Quand on parle de harcèlement sexuel, le contexte est très important. Demander poliment un rendez-vous galant à un collègue de rang égal peut être parfaitement légitime et ne dérangera, n’embarrassera et n’effraiera probablement pas l’autre personne. Par contre, la même proposition venant d’un supérieur peut être très embarrassante si la personne a le sentiment qu’elle pourrait en subir des conséquences néfastes en cas de refus.
Un autre élément contextuel important est le sens que l’on accorde à l’expression « milieu de travail ». Dans certains cas, il est évident. Le harcèlement sexuel qui se produit dans vos bureaux ou sur les lieux de travail se produit évidemment au travail. Cependant, l’expression « milieu de travail » englobe aussi les situations où une personne représente son employeur, ou encore des situations où la dynamique de pouvoir du milieu de travail est présente, par exemple un dîner avec des clients, un déplacement vers un lieu de travail ou même une fête. Les collègues restent des collègues, même à l’extérieur des lieux physiques où ils travaillent, et ces relations et dynamiques de pouvoir sont le véritable sens de ce que l’on entend par « milieu de travail ».
Le harcèlement sexuel au travail est l’affaire de tous
De nombreux mythes et postulats circulent sur le harcèlement sexuel au travail. Dans la définition du harcèlement sexuel au travail, rien ne dit que les personnes qui harcèlent sont des hommes et que les victimes sont des femmes. Les études montrent que la majorité des victimes sont des femmes, mais ce n’est pas toujours le cas. Le harcèlement sexuel ne doit pas nécessairement avoir une connotation d’attirance sexuelle. Le harcèlement d’une employée parce qu’elle est enceinte, ou d’une personne dont l’expression de genre ne correspond pas à la norme du milieu de travail reste du harcèlement sexuel. N’importe qui peut être victime de harcèlement sexuel au travail et n’importe qui peut harceler quelqu’un, mais certaines personnes en sont plus souvent victimes que d’autres. Les personnes qui présentent certaines caractéristiques considérées comme des motifs illicites de distinction, comme être une personne handicapée, être membre d’une minorité racisée, ou membre de la communauté LGBTQ2S+, courent toutes un risque accru de subir du harcèlement sexuel au travail.
Que vous soyez employeur, employé, intervenant ou entrepreneur, il est essentiel de comprendre la définition juridique du harcèlement sexuel au travail. Vous pourrez ainsi mieux comprendre vos droits et vos responsabilités en milieu de travail. C’est une première étape indispensable pour pouvoir prendre des mesures efficaces de lutte contre le harcèlement sexuel au travail et créer des environnements de travail plus respectueux au Yukon.
Si vous avez des questions sur le harcèlement sexuel au travail, contactez la Commission des droits de la personne du Yukon. Nous sommes là pour vous aider!