Le plaignant travaillait pour l’intimé au Centre correctionnel de Whitehorse. Le plaignant est membre de la Première nation des Tr’ondëk Hwëch’in. En 1998, la nation des Tr’ondëk Hwëch’in en était à l’étape de sélection définitive des terres dans les négociations relatives aux revendications territoriales du Yukon. Comme le plaignant est l’aîné de sa famille, il se sentait le devoir de faire ses propres recherches et d’assister aux réunions sur les revendications territoriales pour veiller à ce que les terres ancestrales de sa famille soient protégées. Il craignait aussi que les gouvernements fédéral et territorial accordent la priorité aux intérêts de tierces parties. Compte tenu de ces réserves, le plaignant sentait qu’il se devait de participer à la réunion concernant les revendications territoriales. Il a donc manqué du travail pour assister à la réunion et plus tard aussi en raison du stress que lui a causé le processus de négociations. Au total, il a manqué 31 jours de travail.
Un peu avant la fin du processus, le plaignant a fait une demande de congés spéciaux pour ses 31 jours d’absence. Les congés spéciaux sont prévus à l’article 24.06 de la convention collective conclue entre le gouvernement du Yukon et l’Alliance de la fonction publique du Canada. Aucune demande du plaignant n’a fait mention de congé lié au stress. Il a plutôt indiqué sa participation aux réunions sur les revendications territoriales comme raison de son absence. Ses demandes lui ont été refusées. Il convient de souligner que le plaignant n’a pas déposé de grief aux termes de la convention collective.
Une plainte a été déposée devant la Commission des droits de la personne du Yukon (la Commission). La plainte soutenait que, dans son interprétation de l’article 24.06, le gouvernement du Yukon avait commis de la discrimination à l’endroit du plaignant sur le motif de son ascendance et de sa religion en négligeant de tenir compte de ses obligations culturelles et religieuses.
Le Conseil d’arbitrage de la Commission des droits de la personne du Yukon (le Conseil) a examiné les questions suivantes :
- Le Conseil a-t-il le pouvoir légal d’entendre cette plainte étant donné que le plaignant n’a pas déposé de grief alors que la convention collective lui donne le droit de le faire?
- Si oui, s’agit-il d’un cas de discrimination prima facie?
- Si oui, l’intimé a-t-il respecté son obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’égard du plaignant?
- Sinon, quel est le recours qui s’impose?
En premier lieu, le Conseil a déterminé que, même si un employé est lié par les dispositions de la convention collective, il conserve les droits fondamentaux prévus dans la Loi sur les droits de la personne du Yukon (la Loi). Les dispositions de la convention collective sont toujours subordonnées à la Loi. Ainsi, si un employé estime que son employeur a violé la Loi en appliquant la convention collective, il peut décider de ne pas formuler de grief et plutôt de déposer une plainte relative aux droits de la personne. Finalement, le Conseil a conclu qu’il avait le pouvoir de déterminer s’il y avait eu discrimination lors de l’application de la convention collective.
En second lieu, le Conseil a examiné s’il y avait eu discrimination prima facie. Autrement dit, à première vue, semble-t-il y avoir eu discrimination? Dans cette affaire, le Conseil n’a pas tenu compte de la période de congé lié au stress, car le plaignant ne participait alors pas à des activités directement liées à ses responsabilités ancestrales/religieuses. À la lumière de son analyse, le Conseil a estimé qu’il n’y avait pas eu de discrimination prima facie. L’article 24.06 de la convention collective précise qu’à la discrétion de l’employeur, un congé spécial payé peut être accordé. Le Conseil a conclu que l’intimé avait exercé son pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable quand il a refusé la demande de congé spécial du plaignant. L’article 24.06 concerne les cas où un employé ne peut physiquement pas se présenter au travail. Dans cette affaire, le Conseil n’a pas accepté l’explication du plaignant selon laquelle il avait été contraint de s’absenter du travail. Il aurait pu, par exemple, demander un congé de maladie ou essayer de modifier son horaire.
Les troisième et quatrième questions sont hors de cause étant donné que le Conseil a déterminé qu’il n’y avait pas eu de discrimination prima facie.