Le conseil scolaire intimé était préoccupé par des problèmes de drogues et d’alcool à l’école intimée et songeait à introduire un chien renifleur dans l’école. La plaignante, l’une des élèves de l’école, était très allergique aux chiens. Sa mère a déposé une plainte devant la Commission des droits de la personne du Yukon (la Commission). L’école s’est abstenue de faire appel à un chien renifleur en attendant que la plainte ait été instruite. La Commission a rejeté la plainte à la suite d’une enquête. La plaignante et sa mère ont alors demandé une révision judiciaire. La plaignante a également présenté une demande d’injonction à la Cour suprême du Yukon (la Cour). Rappelons qu’une injonction est une ordonnance du tribunal interdisant une partie de commettre un acte précis. En l’occurrence, l’injonction visait à empêcher le conseil scolaire intimé de déployer le chien renifleur jusqu’à l’issue de la révision judiciaire et, s’il y a lieu, de l’audience devant le Conseil.
Le critère juridique applicable aux injonctions trouve son fondement dans l’arrêt de la Cour suprême du Canada intitulé RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général). Il se divise en trois volets :
- l’injonction doit porter sur une question grave;
- le refus de la demande doit donner lieu à des préjudices irréparables pour le demandeur;
- la Cour doit prendre en compte la prépondérance des inconvénients et se demander quelles parties subiraient le plus grand préjudice si la demande d’injonction était accordée, ou refusée.
Premièrement, la Cour suprême du Canada a établi qu’il suffit de peu pour répondre au critère de la gravité de la question. Il suffit en fait de prouver que la demande n’est pas frivole ou vexatoire. La Cour a conclu que ce n’était pas le cas. Elle a donc déterminé que l’injonction portait sur une question grave.
Deuxièmement, la Cour a jugé que la plaignante subirait des préjudices irréparables si la demande d’injonction était rejetée. Si le conseil scolaire intimé déployait ce chien renifleur, elle serait obligée de changer d’école. Le préjudice irréparable serait donc la perte du choix de son école et peut-être même le refus d’une mesure d’adaptation à une incapacité.
Troisièmement, la Cour a évalué la prépondérance des inconvénients et s’est demandé quelles parties subiraient le plus grand préjudice si la demande d’injonction était accordée, ou refusée. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte à cette étape. En l’occurrence, la Cour a déterminé que la question prépondérante était l’intérêt public. En sa qualité de particulier, la plaignante devait donc prouver que la délivrance de l’injonction se traduirait par des bienfaits d’intérêt public. Cette affaire portait sur des questions de droits de la personne qui transcendaient les seuls intérêts de la plaignante. En effet, le conseil scolaire intimé s’employait depuis des années à lutter contre les problèmes de drogue à cette école. L’introduction d’un chien renifleur cadrait bien dans l’environnement social et scolaire de l’établissement et servait les intérêts supérieurs de l’école et de la communauté. L’école avait déjà attendu avant de déployer le chien. Il aurait été déraisonnable d’attendre la conclusion d’une révision judiciaire et de toute audience pouvant en découler, car ces procédures pouvaient s’éterniser.
Par conséquent, la Cour a rejeté la demande d’injonction.