L’intimé en a appelé de la décision du Conseil d’arbitrage de la Commission des droits de la personne du Yukon (le Conseil) dans l’affaire McBee (Molloy) c. Gouvernement du Yukon. La Cour suprême du Yukon (la Cour) a été saisie de l’appel.

L’intimé a avancé les problèmes suivants qui, selon lui, représentent des erreurs de droit :

  1. La conclusion du Conseil selon laquelle la discrimination avait été un facteur du congédiement de la plaignante est erronée;
  2. Le Conseil n’aurait pas dû tenir compte du témoignage de la plaignante ni lui accorder de l’importance, car elle n’a pas terminé son contre-interrogatoire. De plus, le Conseil n’a pas indiqué l’importance qu’il avait accordée au témoignage de la plaignante;
  3. Le Conseil a accordé une réparation qui dépassait ses compétences.

Dans son appel incident, la plaignante a soutenu ce qui suit :

  1. Le Conseil a pris une décision concernant la réparation sans entendre l’une ou l’autre des parties;
  2. Le Conseil a accordé une réparation qui dépassait ses compétences;
  3. Le Conseil a pénalisé son absence et aurait dû lui accorder une réparation personnelle.

La Commission ne s’est pas prononcée pendant l’appel.

Voici la position de la Cour eu égard aux problèmes relevés par l’intimé et la plaignante.

En ce qui concerne le premier point, l’intimé a soutenu que le Conseil n’avait pas fourni une analyse claire de la preuve ou de son application à savoir s’il y avait eu discrimination. Le Conseil n’a pas présenté le raisonnement logique qui lui a permis de tirer ses conclusions à partir des éléments de preuve. La Cour a donné raison à l’intimé sur ce point. En effet, le Conseil n’a pas indiqué, dans sa décision, ce qui l’a amené à conclure qu’il y avait eu discrimination. Il n’a pas non plus analysé la Politique sur les conflits d’intérêts de l’intimé ni les motifs du congédiement de la plaignante. Le Conseil n’a par ailleurs pas demandé si la plaignante avait bel et bien enfreint cette politique. Cette information aurait aidé le Conseil à déterminer si l’intimé avait eu un motif valable de congédier la plaignante.

Ensuite, la Cour s’est penchée sur la question du témoignage de la plaignante. Dans ce cas, le Conseil a fait la distinction entre la plaignante, qui a subi un contre-interrogatoire considérable, mais incomplet, et une personne qui n’aurait pas subi du tout de contre-interrogatoire. Il n’en demeure pas moins que le Conseil aurait dû envisager l’importance qu’il allait accorder à la preuve testimoniale de la plaignante. Il aurait dû aussi évaluer la crédibilité des témoins.

La Cour a ensuite examiné les points soulevés par l’intimé et la plaignante concernant la réparation. Les deux parties ont fait valoir que le Conseil avait accordé une réparation qui dépassait ses compétences juridiques. Elles avançaient que les pouvoirs accordés au Conseil sont limités par le paragraphe 24(1) de la Loi sur les droits de la personne du Yukon (la Loi). L’alinéa 24(1)b) précise que le Conseil peut accorder une réparation pour modifier toute condition qui entraîne la discrimination. Les deux parties ont soutenu que la réparation ordonnée par le Conseil était sans rapport avec la discrimination présumée dans l’affaire, c’est-à-dire que l’état matrimonial de la plaignante ou le casier judiciaire de son conjoint de fait avait été un facteur du congédiement de celle-ci. Plutôt, le Conseil a ordonné à l’intimé de prévenir les situations de violence conjugale sur le lieu de travail.

La Cour était d’accord avec la position des deux parties. La plainte déposée au Conseil ne visait pas à savoir si la plaignante était victime de violence conjugale ou non. De plus, la Cour a conclu que le Conseil n’aurait pas dû décider d’une réparation sans avoir entendu les deux parties. Dans cette affaire, la transcription a révélé que le Conseil avait laissé entendre qu’il autoriserait la présentation, à une date ultérieure, d’éléments de preuve et d’arguments concernant la réparation, ce qui n’est pas la procédure habituelle.

Par conséquent, la Cour a infirmé la décision du Conseil et a ordonné que l’affaire soit de nouveau portée devant la Commission.